De Patrick à Pierre Vernet
Tout a commencé pour moi par cet article dans la revue Echappement (ci-dessous). J’ai 18 ans, je suis fan de rallye et Patrick Vernet vient de décrocher un volant d’usine chez Peugeot Sport. On est en 1991. Le pilote aveyronnais, après plusieurs saisons en formule de promotion Renault dans le cadre de la Coupe R5 Gt Turbo, va piloter une 309 GTI groupe A officielle, récompense promise aux deux premiers du Volant Peugeot Shell 1991 (formule de promotion, disputé sur des 309 GTI 16 groupe N). Christian Gazaud (1er) et Patrick Vernet (2ème) laissent ainsi un jeune espoir, un certain Gilles Panizzi, sur le banc des redoublants (il remportera le Volant Peugeot l’année suivante, et deviendra par le suite la référence mondiale sur asphalte, le « Tarmac Master »).
Vingt quatre ans plus tard, c’est au tour de son fils Pierre Vernet, 22 ans, de se lancer dans cette difficile entreprise qui consiste, pour commencer, à trouver un budget afin de se lancer dans une formule de promotion. Pierre ne manque pas de ressources. C’est d’ailleurs assez difficile de le décrire en quelques mots tellement cet élève ingénieur en informatique est un touche à tout de talent : Copilote au coté de son père ou ses amis (Germain Bonnefils, Cédric Mazenq …), communication (Société BRX, créée avec Germain Bonnefils), promotion, photographie, montage vidéo, stage de pilotage … et même, comme vous allez le découvrir le commerce de bonnets.
Mais comme vous le savez, sur Pilote de course nous c’est le pilotage et les pilotes. Alors voyons qui se cache derrière le nouveau Vernet.
Pierre Vernet : de ses débuts à aujourd’hui
Bonjour Pierre. Tu peux revenir sur tes débuts ? Tu as débuté sur quel Rallye ? Avec une auto de location (106 rallye) ? Combien de rallye au compteur (comme pilote) ?
Mes débuts en « pilote », je les ai à vrai dire effectués en circuit… Et bien qu’il y ait parfois une petite rivalité circuit/rallye, c’était une expérience fabuleuse, dont je garde un excellent souvenir ! Du temps où Germain Bonnefis roulait dans le Volant Peugeot 207, il essayait de temps en temps de courir sur circuit pour « proprifier » son pilotage. Et, un jour, pour me remercier des travaux que j’effectuais pour lui, il m’a offert une course à ses côtés… C’était une course de formule Ford historique. Des monoplaces qui glissent, avec des pneus « plus vieux que moi » – pour reprendre les termes du loueur -, le tout dans une bonne ambiance. Après un tête à queue à 200km/h lors des essais libres, je m’étais assez vite familiarisé avec cette auto, si bien que je terminais les qualifs devant Germain (ça doit être la seule fois de ma vie où j’ai été devant lui, j’ai le droit d’en être un peu fier non ? :p). Évidemment, il s’était employé à remettre les choses dans l’ordre lors de la course… Malgré cela (et les courbatures liées à l’arceau qui te rentre dans les jambes ou l’absence de direction assistée), c’était génial !
A la fin de cette année là, je voulais disputer un rallye « pour essayer », mais des soucis de santé m’en ont empêché… J’ai donc attendu la saison suivante. Avec, comme tout débutant, un tout petit budget, j’ai trouvé une 106 F2000/12 de location quasiment d’origine dont j’ai négocié le prix pour trois rallyes régionaux. Je suis donc parti au Rallye du Chasselas avec Justine Camaly à ma droite et un sentiment mélange d’appréhension et d’impatience ! Face à moi il y avait six F2000/12 dont une espèce de Saxo Kit Car 1400 cm3, je n’avais donc pas d’ambition particulière, vu le niveau de performances de mon auto et ma ridicule expérience. Malgré cela, je terminais second de la classe, en ayant finalement signé un « scratch » du F2000/12 dans le dernier tour (j’y tenais secrètement depuis le début et ça m’avait d’ailleurs coûté un tête à queue au tour d’avant…). La performance n’était pas mirobolante, surtout d’un œil extérieur, mais Germain qui avait essayé l’auto, mon papa qui avait passé le weekend à mener des analyses poussées comme à son habitude et quelques amis connaisseurs venaient me féliciter à la fin pour les passages et le fait d’être au bout… Je supposais donc que ça ne devait pas être aussi ridicule que ce que je pensais et m’apprêtais à poursuivre mon apprentissage lors d’un second rallye… puis de quelques autres (6 exactement).
Rallye du Chasselas (2013), Durenque Mont-Lagast (2013) et 100 Vallées (2013) sur 106 F2000-12. Rallye du Gard et Montagne Noire en 2014 sur Twingo R1. Et enfin Terre du Vaucluse 2014 en Saxo N2. Justine Camaly est donc ta copilote depuis tes débuts ? Olivier Fournier t’a co-piloté sur terre non ?
Oui, au début, je cherchais un ou une copilote qui soit motivé pour rouler dans une petite auto, si possible jeune et sympathique, et avec quand même une expérience un peu conséquente. Justine s’est montrée motivée quand je lui ai soumis l’idée et, comme ça s’est très bien passé, je n’ai vu aucune raison de changer cet équipage ! Il n’y a que pour le Terre du Vaucluse qu’il me fallait autant que possible quelqu’un de très expérimenté. En effet, je découvrais la terre, mon dernier rallye s’était soldé par une grosse sortie suite à une incompréhension de note (Cf. Vidéo crash Montagne Noire) et je voulais quelqu’un capable de me coacher pour signer un résultat probant tout en évitant la moindre bêtise ! Olivier est un ami, qui me connaît depuis que je suis né (et qui saurait donc m’engueuler ou me motiver si besoin) et dont la compétence et l’expérience ne sont plus à démontrer. Quand je lui ai proposé de me naviguer, je ne pensais honnêtement pas qu’il accepterait. D’une part ses responsabilités professionnelles l’occupent assez, d’autre part je voyais mal comment, un rallye en N2 avec Pierre Vernet, pouvait le faire rêver, après tout ce qu’il avait vécu… Mais il a gentiment accepté et je suis sincèrement honoré d’avoir pu faire un rallye avec lui, même si la mécanique a abrégé l’aventure. Son organisation est tellement bonne que tu peux ne penser qu’à conduire, son calme en spéciale et en dehors te donnent l’impression qu’il ne peut rien t’arriver, c’était court mais top !
Comment as tu connu Rallye Académie et Eric Fabre ? Tu es le lauréat de leurs derniers challenges (Saxo terre), c’est bien ça ?
Je suis en effet le Lauréat du Volant Rallye Académie, une sélection organisée par la structure depuis plusieurs années. Cette victoire m’a donné l’opportunité de disputer le Terre du Vaucluse avec une Saxo N2 …
A la base, je les connaissais de nom, par l’existence du Volant Rallye Académie, mais aussi parce-que je savais qu’ils faisaient rouler des pilotes que je suivais de plus ou moins près comme Florian Bernardi. Mais je n’avais jamais été en contact avec eux.
Quand j’ai voulu m’essayer au Challenge Renault Sport, j’ai évidemment cherché à louer une Twingo. Eric Fabre m’a fait une proposition qui m’a paru honnête, au moins par rapport à ses « concurrents », et j’ai donc décidé de louer une Twingo Rallye Académie pour le Rallye du Gard.
Dès le premier roulage au pôle mécanique d’Alès, j’ai tout de suite apprécié Eric et sa façon de voir son métier. Il aime dire qu’il n’est pas là uniquement pour louer une auto … Et il a l’avantage de joindre à ces paroles des actes. Il est passionné par ce qu’il fait, a une sincère envie que l’on progresse et un une pédagogie aussi agréable qu’efficace … Il est même prêt à souffrir pour faire progresser « ses » pilotes, puisqu’il est monté à mes côtés en essais d’avant Montagne Noire avec une épaule démise !
Jusqu’à présent tu as choisi la location. Chez Blanc Location pour la 106 Rallye puis chez Rallye Académie pour la Twingo RS. C’est un choix qui repose sur quel critère ?
C’est un débat que j’ai souvent eu avec mon père ! En fait, je pars du principe que l’intérêt d’avoir son auto repose sur le fait d’être capable de l’entretenir tout seul, afin de réduire les coûts. Ce n’est pas du tout mon cas, changer des plaquettes étant à peu près le summum de mes compétences en mécanique !
D’autre part, quand on possède son auto, il faut toujours compter sur l’aide de ses amis pour l’assistance notamment. Je trouve que, sur le long terme, c’est gênant de toujours les solliciter, même s’ils le proposent souvent avec plaisir.
Ensuite, une fois que l’on a goûté à la location, c’est franchement difficile d’imaginer courir autrement. On peut se concentrer sur sa course en négligeant tous les autres aspects, le loueur s’occupant de tout. Alors certains diront que c’est du luxe, mais c’est ma façon de voir les choses … Je préfère faire trois rallyes dans la saison dans de bonnes conditions, plutôt que cinq complètement à l’arrache !
Enfin, comme il faut toujours penser au pire avant d’envisager le meilleur, il faut prendre en compte le fait que les voitures de location sont normalement assurées et qu’en cas de grosses sortie, nous n’avons qu’une franchise à payer ! C’est tout de même une sécurité non négligeable financièrement parlant… Dans le cas de la Twingo que nous avons détruite à la Montagne Noire, ça aurait probablement été la fin de ma minuscule carrière rallyestique si ça avait été mon auto non assurée … Ca mérite d’être médité !
Je comprends Et puis tu peux toujours louer à prix très préférentiel une Golf GTI VHC, non ? Ok si tu la casses, ça risque de compliquer les relations familiales 😉
Il y a effectivement une Golf VHC dans le garage, mais je pense que le jour où je serais à son volant, c’est que mon père sera tombé sur la tête ! Ce n’est pas l’envie qui manque, car c’est maintenant une auto qui a l’air vraiment très sympa à conduire, bien qu’un peu physique. Mais je pense que mon père ne me ferait pas assez confiance… Enfin, c’est quelqu’un de très rationnel, qui aime prévoir absolument tout, alors peut-être que si je ficèle cela assez bien, en l’assurant correctement, il peut y avoir une petite chance ! A voir…
A ce sujet, j’ai été surpris par la vidéo dans la Golf au Cévennes. Non seulement tu copilotes mais en plus tu donnes bcp d’informations, tu conseils un ancien pilote Peugeot Sport, qui plus est ton père.
Pour ce qui est de copiloter mon père, je ne suis pas vraiment le meilleur copilote qu’il pourrait avoir. Par contre, j’ai l’avantage d’être assez proche de lui pour pouvoir me fâcher si besoin ! C’est un compétiteur et les années n’ont pas changé son état d’esprit… Si je ne le tempère pas, il prend le départ d’une ES au même rythme qu’à la grande époque ! Après, les conseils que je lui donne, ce n’est évidemment pas pour lui apprendre à conduire, je pense sincèrement qu’il a bien plus de talent que moi encore aujourd’hui, avec notamment un cœur impressionnant dans le rapide (et pourtant, je crois que je commence à être monté à côté de pilotes pas trop mauvais !). En fait, j’essaie de lui donner un maximum d’informations car il n’est pas du tout habitué à rouler avec trois passages de reconnaissances et je conçois que cette adaptation ne doit pas être évidente pour lui ! Et puis il fait partie d’une génération où l’idée était, comme il le dit lui même, de passer chaque virage le plus vite possible, pour caricaturer. J’essaie donc de lui apporter ma vision à moi, celle de sacrifier des virages pour privilégier ce qu’il y a derrière, d’inclure dans les notes ces notions de sacrifices et de placement sur la route… C’est un peu contre-nature pour lui, mais quand j’arrive à lui démontrer que ma façon de faire est plus efficace, il met de la bonne volonté à essayer d’appliquer ce que je lui dis, ce qui rend la chose enrichissante pour nous deux je pense !
Pour revenir à ton projet 2015, tu es un pilote labellisé « Rallye-Academie », la structure monté par le premier Champion de France Super 1600, Eric Fabre, un fidèle animateur des formules de promotion Citroen du temps des AX et Saxo. Tu as gagné le volant mis en jeu par cette structure en fin d’année 2014 (participation au Rallye Terre du Vaucluse en Saxo). Le choix du Challenge N2S semble naturel pour toi. Une continuation logique en quelque sorte … mais aussi la plus accessible financièrement non (comparé aux DS3 R1 et R3 Max ou 208 Cup) ? Avec des autos tirées au sort, c’est bien ça ?
Alors je ne sais pas si je peux me considérer labélisé Rallye-Académie … Mais ça me fait en tous les cas plaisir que tu le penses, car les pilotes que l’on peut considérer comme tels sont des pilotes rapides, mais également simples et sympathiques, comme par exemple Fred Hauswald ou Dorian Delagne.
Quant au Challenge N2 Série, indépendamment de mon « lien » avec Rallye Académie, c’est tout simplement la seule formule de promotion que je peux envisager de faire. L’argent est parfois un sujet tabou mais, on ne va pas se mentir, une manche du CDF Junior en DS3 R1 coûte 10 000€ une fois passé partout… Quant aux autres autos que tu cites, je ne préfère même pas en parler, c’est se faire du mal ! Et même en y consacrant en ce moment pas mal d’énergie, je ne suis pas encore certain de pouvoir prendre part à ce Challenge… Donc pour d’autres championnats, ce n’est même pas envisageable ! En dehors de ces aspects financiers, je trouve l’initiative juste excellente ! Les autos proches de la série, les différents types de route, l’accent mis sur l’équité avec notamment le tirage au sort des autos, tout ça avec ce budget contenu… En toute honnêteté, c’est pour moi un retour à ce que signifie réellement « formule de promotion » !
La suite est à découvrir ou redécouvrir ici … Pierre Vernet : une histoire de famille (2)
A la mémoire de Pierre Vernet, trop tôt disparu d’une longue maladie…
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