Anne-Chantal Pauwels une vie à 300 km/h
Nous avons laissé Anne-Chantal Pauwels (voir l’article Anne-Chantal Pauwels partie 1) alors qu’elle venait d’abandonner dans une spéciale du Rallye Monte Carlo 1990 près de Gap, dans la neige, sans eau dans le radiateur de la 309 GTI qu’elle pilotait suite à sa victoire dans le Volant GET. Le moral en berne, comment va rebondir notre championne ?
Comment êtes vous parvenue à rebondir après cet abandon au Rallye Monte Carlo en janvier 1990 ?
Après le rallye Monte Carlo 1990, je me suis orientée vers mon autre passion : l’hélicoptère. Je suis partie une année sur Paris suivre une formation de pilote d’hélicoptère professionnel.
Et fin 90, François m’appelle et me dit : « écoute, si tu veux tu reviens en 91, pour la consécration de tes efforts depuis le début, parce qu’on me propose une place chez Ford en Championnat du Monde des Rallyes sur la nouvelle Ford Sierra Groupe A ». J’ai accepté pour une année en tant que copilote professionnel chez Ford en Championnat du Monde, même si je m’étais déjà partiellement orientée vers le milieu de l’hélicoptère. J’ai laissé ma place à Daniel Grataloup pour ce qui aurait du être mon dernier rallye, le RAC en 1991, afin qu’il soit parfaitement opérationnel pour l’année suivante aux cotés de François, dès le Monte Carlo 1992.
Il a fallu attendre 1998 avant de vous revoir en Championnat du Monde des Rallyes aux cotés de Isolde Holderied au sein du célèbre TTE, le Toyota Team Europe. Comment avez-vous vécu cette expérience ? Et avant cela, que s’est-il passé pour vous entre fin 1991 et début 1998 ?
Je suis devenue journaliste pour le magazine Compte Tours. Je racontais les courses que je découvrais et auxquelles je participais comme pilote amateur, au volant de voitures que l’on me prêtait pour l’occasion. En Formule France, en Karting, en Course de Côte, dans le désert, etc … j’ai du participer à plus de 60 courses ainsi, ce qui m’a forgé une solide expérience dans toutes les disciplines.
En 1997, j’ai eu une proposition : participer au Rallye du Maroc avec Jean-Louis Schlesser en vue de préparer le Dakar l’année suivante. J’ai accepté. Nous avons terminé 9ème suite à un souci mécanique (fuite d’eau radiateur), alors que nous étions régulièrement dans les 3 premiers. Et donc logiquement, nous avons participé au Dakar 1998, où nous avons terminé 4ème. Une belle performance puisque nous étions en 2 roues motrices avec le buggy.
En 1998, Isolde Holderied était à la recherche d’une copilote et m’a proposé de participer à 5 manches avec la Corolla WRC en Championnat du Monde des Rallyes dans la structure du TTE (Toyota Team Europe). Une super auto et une super équipe. La seule contrainte était de balancer les notes en allemand. J’ai du me replonger dans l’Allemand, et ça s’est super bien passé, même si les résultats n’étaient pas toujours là, car Isolde sortait beaucoup de la route à l’époque.
En fait, en me rappelant tous ça, je me rends compte que j’adore tout ce qui touche au sport automobile, mais pas tant la performance pure que le coté humain et technique. La découverte d’un nouveau Team, bosser avec des Italiens, des Anglais, des Allemands. J’adore travailler à l’échelle mondiale, côtoyer toutes les cultures, toutes les nationalités, c’est une richesse et une chance incroyable de toucher à tout !
Anne-Chantal Pauwels en 2015-2016
Quel est votre quotidien aujourd’hui ? Pouvez vous nous décrire vos diverses activités ? Notamment chez BM World Magazine ?
La base de mon métier, finalement, c’est le journalisme … J’ai participé à la création d’une petite vingtaine de magazines, avec plus ou moins de bonheur et de succès. Certains ont été arrêtés, d’autres ont été vendus, certains ont perduré des années (et perdurent encore !). Prendre les premiers contacts, imaginer la ligne éditoriale et faire les premiers reportages, bref, construire le projet de A à Z est un gros défi, parfois dans des milieux où je suis totalement néophyte (campings cars, pin’s, …). Je suis même partie au Québec une bonne dizaine de fois d’affilée durant 18 mois afin de créer un magazine là-bas. C’était d’un enrichissement incroyable, à titre personnel, car non seulement je me baladais au Canada en toutes saisons en voiture partout, (de -30° à +36°C), mais je « travaillais » avec des Québécois ; ils sont à la hauteur de leur réputation : accueillants, chaleureux, authentiques, et surtout fiables en business…
Aujourd’hui nous avons BM World Magazine, un journal entièrement consacré aux BMW, dans lequel je traite une trentaine de pages de reportages à chaque numéro … Et plus récemment on vient de sortir « Stadium », le magazine relatif aux activités du circuit Stadium d’Abbeville, et décrit en plus un certain art de vivre en Baie de Somme et sur la Côte d’Opale. J’ai récemment décrit l’expansion des activités de l’association Picardie Nature, qui soigne et relâche les phoques de la grosse colonie de la Baie de Somme. C’est très amusant car ceci me permet de diversifier mes activités journalistiques, et de sortir des « voitures » !
J’adore le métier de journaliste, je trouve ça très enrichissant. Je me charge des photos et des interviews, je farfouille, j’enquête, j’aime écrire. ça représente pour moi .. un mi-temps. A propos d’écriture, je viens de lancer deux petits romans pour les enfants…
Durant cette période « après-rallyes », (de 1994 à 2000), j’ai créé la structure du Stadium d’Abbeville avec Gilles Stievenart, qui était alors le concepteur du Magazine Compte Tours. Le Stadium d’Abbeville est aujourd’hui un grand centre de pilotage, mais le projet initial était moins ambitieux. C’était d’abord une école de pilotage sur terre, puis mixte avant d’être revêtue d’asphalte. J’animais les stages de pilotage pour lesquels j’ai créé toute la matière pédagogique, les livrets d’enseignement, le service commercial, le tracé du circuit, le réceptif. C’était génial. J’ai arrêté en 2001 en déménageant vers la Haute-Savoie où j’ai rejoint celui qui allait devenir mon mari : j’attendais un bébé !
Et le milieu de l’hélicoptère dans tout ça ?
Le milieu de l’hélicoptère, bizarrement, n’a jamais vraiment voulu de moi. Et j’avoue n’avoir jamais eu envie de plaquer tous mes jobs, pour attendre des heures durant qu’un vol se déclenche, assise au fond d’un hangar. Ça ne bouge pas assez pour moi, ou je ne suis plus assez passionnée ? Peut-être ! En tout cas, il y a a de moins en moins de vols de Transport Public (ma spécialité : le transport de passagers, contrairement au travail aérien comme le ravitaillement en refuge, les secours héliportés, le débardage de bois). Cette désaffection des vols hélico trouve racine dans plusieurs paramètres, dont la crise économique. Les belles années de l’hélicoptère, pour moi c’était entre 2003 et 2013. J’ai bossé en Bretagne, en Normandie, dans le Sud de la France, à Paris, toujours en tant que vacataire. Il n’y a plus de mono-turbine sur Paris, ces vols sont interdits depuis un an exactement pour des questions de sécurité (panne moteur au-dessus du périph’, ça fait désordre). Les sociétés ont de moins en moins besoin de vacataires pilotes d’hélicoptère. Et les drones commencent à envahir le marché de la photo / vidéo.
Vous avez aussi une activité passionnante chez European Sport Communication où vous parcourez le monde …
Comme il me restait un petit créneau entre 3.00 et 5.00 heures du matin (rire !), j’ai intégré « ESC » European Sport Communication, une structure créée par Bernard Occelli après son arrêt de la compétition (Bernard était copilote de Didier Auriol, premier français champion du monde des rallyes en 1994). Il s’agit d’une société qui organise des voyages sur le thème des rallyes. Ce qui lui a permis d’avoir des partenaires de renoms comme Total, Michelin, Peugeot, Citoën, et aujourd’hui Volkswagen et Hyundai, etc … Il a des groupes de plusieurs dizaines de personnes qui viennent sur des manches de championnat du monde des rallyes. Nous les recevons, les prenons en charge depuis leur arrivée à l’aéroport jusqu’au départ en fin de week-end, et leur expliquons et montrons tout ce qu’est un rallye, à la manière d’un guide spécialisé dans le patrimoine emmènerait des touristes visiter le château de Versailles. On les guide en spéciale, sur les parcs fermés, en minibus, en hélico, on les fait rentrer dans les grosses structures Hospitalité des constructeurs, au sein des teams privés, ils rencontrent les pilotes, les copilotes, assistent à l’assistance sur des estrades privées. C’est super amusant, très varié, c’est l’aventure ! Moi, Bernard me confie souvent des petits groupes très VIP de journalistes, car je me sers de mon background en rallye pour leur fournir des explications très pointues et des anecdotes dont ils enrichissent leurs reportages.
Avez vous une actualité récente ?
Tout récemment, j’ai été élue Présidente du Comité Départemental de Ski du Jura, un poste clé sur le massif jurassien, qui emploie 4 entraîneurs de compétition pour les 4 disciplines du ski : alpin, saut, fond et biathlon. L’équipe est énorme, le budget important et nous fournissons nos entraîneurs aux sections sportives du collège des Rousses et du lycée de Morez (la ville de fabrication des lunettes). Ce ne sont pas moins de 123 élèves qui en profitent, ils skient 2 fois par semaine sur le temps scolaire et rattrapent leur programme aux 1er et 3è trimestre. Et le groupe Compétition sélectionne chaque année 100 petits skieurs de 12 à 18 ans pour leur permettre de progresser en vue de passer leur DE ski, et de devenir moniteur, de participer à toutes les courses de ski de la saison dans de bonnes conditions. Un nouveau challenge, en quelque sorte !
Je ne désespère pas, un jour, de pouvoir éditer un bouquin sur nos aventures en rallye, François et moi. Comme il y a prescription, (rire …) je pourrai raconter notre parcours farci d’anecdotes, de rigolades, de drames mécaniques et de réussite !Tiens, rien qu’une : lors des reconnaissances du rallye des 24 heures d’Ypres, en 1982 ou 1983, nous asticotions tellement les pilotes officiels pendant leurs reconnaissances (nous les suivions pare-choc contre pare-choc ou presque) rien que pour leur montrer « que François savait piloter », que Ragnotti a consenti à venir manger un soir chez François ! A l’époque, on vivait sur le Mont Cassel, on a préparé une côte de porc-pâtes à Jean Ragnotti et son copilote Pierre Thimonier. La Maxi 5 Turbo groupe B de reconnaissances était garée toute la soirée devant la maison de François ! Pour nous c’était l’extase mystique ! Les copains passaient devant, incrédules, super jaloux ! Trop drôle, non ? Des comme ça, j’en ai 3000 à raconter ! Et avec toutes nos conneries de jeunesse, je suis sûre de pouvoir faire rire la moitié de la France (au moins!) …
Crédit photo : archives personnelles et compte facebook de Anne-Chantal Pauwels
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Quelles personnalités !
Ce duo était vraiment exceptionnel, et quel éclectisme de Anne-Chantal !
Respect.
Effectivement. Merci Denis.